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Critiques et autres broutilles
24 mars 2008

Scandaleusement Célèbre de Douglas McGrath

La triste renommée

Observateur cruel et sarcastique, Capote travaille sur son prochain livre tant attendu tiré d’un fait divers du Kansas : le massacre d’une famille de fermiers pour quelques 50 dollars. Mais une fois les meurtriers arrêtés, jugés puis condamnés, il ne se contente plus de reconstituer les faits, il les devance. Car pour achever ce qui deviendra son chef-d'oeuvre il fallait que l'histoire elle-même se termine. Afin d’accomplir sa tâche d’écrivain, Capote ment et triche avec les accusés, allant jusqu'à infléchir le cours des événements. Perry Smith, dont il était devenu proche, devient alors plus que l'objet de son roman-document : Truman fait de lui un personnage de fiction. Fiction qu'il invente, jour après jour, mensonge après mensonge. Jouet vulnérable dans les mains de Capote, le coupable devient victime, réduit à un personnage romanesque. Avec Truman Capote, sorti il y a un an, Bennett Miller livrait bien plus que le portrait saisissant d’un géant américain. Il dévoilait, non sans cynisme, les rouages du processus de la création littéraire. Philip Seymour Hoffman, justement récompensé aux Oscars pour le meilleur rôle masculin, évoluait avec grâce et précision et révélait toute la complexité des rapports d’un écrivain à ses personnages qu'il façonne puis manipule en véritable démiurge. Du personnage, Scandaleusement célèbre ne retient que l’enveloppe. Capote, dans le film de Douglas McGrath, n’est rien de plus qu’un petit excentrique à la voix de fausset. Alors que Philip Seymour Hoffman apparaissait double et inquiétant, Toby Jones n’est que le simulacre d’un petit homme mondain et ne trompe personne. Aucun trouble, aucune ambiguïté dans ses relations avec les meurtriers. Juste cette sale manie d’accentuer jusqu’à la limite du ridicule ce côté dandy, cette préciosité inutile lorsqu’elle est limpide mais si troublante chez un homme qui se révèle être un monstre. Lorsque le Truman de Miller se perd dans des affres et des dilemmes moraux, hésitant entre compassion et gloire, le Capote de McGrath hésite lui entre caviar et champagne. L’un est en plein désert humain, le second n’éprouve que celui du Kansas et semble en avoir oublié le livre qu’il est en train d’écrire. Si sa petite personne prête souvent à sourire, son personnage devient si vite lassant qu’il nous fait regretter le caractère impénétrable du Truman Capote ayant à jamais les traits d’un Philip Seymour Hoffman triomphant.

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